Être Français(e) à New York…

(Grattement de gorge) Oyez oyez chers internautes. J’aimerais remettre les points sur les « i » car une rumeur circule disant que vivre à New York c’est « d’la chance » (Cf vos commentaires+twitter). NON ! Depuis l’été dernier j’essaie de vous prouver que New York c’est « Cool », que tout amoureux d’la culture urbaine est dans son univers et que la ville est plus hip hop que la plus hip hop de tes copines. Mais attention, New York c’est loin d’être la fête au village. Déjà, tu pars pas dans la Big Apple sur un coup de tête. Enfin pas plus de 3 mois. Visa oblige. Donc être Français à NY ça implique que tu aies vécu une bonne dose de galères de paperasse, d’entretiens sans fin et autres joies de l’administration Obama pour être accepté dans l’antre du cainrisme. Alors une fois ces nuits blanches et ce stress passés, tu te retrouves droppé d’un avion-charter à JFK, seul au monde face à la jungle New-yorkaise qui coûte un bras dès que tu veux te loger, te nourrir ou soigner ton indigestion due à leur bouffe infâme. Alors, New York, welcome to the good life ?

Si tu es un petit bambi à NY, tu te fais manger direct. Y’a que des lions ici et ils ont la dalle. Alors la moindre faille, le moindre signe de faiblesse, et c’est fini pour oit. En gros, ici faut être sans arrêt sur tes gardes, réussir à t’imposer petit à petit, solidifier tes bases et garder en tête que tout peut changer en un instant. Un jour tu as. Le lendemain tu n’as plus. Bienvenu à New York, la ville où tout se fait et se défait aussi vite que l’ombre de Zorro. Nous, Frenchy, on n’est pas habitués à ça. Avec nos 35 heures, nos CDI, nos RTT et nos jours fériés, on en serait encore au stade de la réflexion pendant qu’eux, ils inspecteraient déjà les travaux finis. Donc, faut te faire au rythme, au choc des cultures, au fait que tes repères sont chamboulés et puis New York c’est aussi le royaume de l’individualisme. Tu crèves ? Bah crève loin d’moi s’te plait, moi Hamdoullah ça va donc bouge. Apprête toi à être calculé que si tu as des choses à donner en échange… Contacts, popularité, argent, temps. Sinon, les « amis » se feront rares. Du moins, chez les New-yorkais. En fait, après avoir réalisé dans quel endroit je vivais, j’me suis résignée à ne rien attendre de cette ville et de ses habitants. Comme ça, c’est toujours une bonne surprise ! Et comme t’as pu le constater dans mes chroniques, j’en ai pas mal. Après c’est clair, je parle pas trop des mauvais côtés dans ces articles, c’est un choix, mais crois-moi copain, y’en a !

Et quand tu rentres en France en coup de vent, finalement, ça fout les boules. Pressé, demandé partout, tu cours sans arrêt. Tu vois tes potos une heure chacun, les écoute avec attention et arrivé à ton tour de raconter, tu sais que tu peux pas rentrer dans les détails. De un, ça prendrait trop de temps. De deux, ton quotidien New-yorkais n’est pas si pailleté qu’il y parait. Entre le no-life-style, le loyer à 4 chiffres à payer, les relations humaines biaisées, la mentalité capitaliste aigüe qui te donne la nausée, l’indifférence notoire de ses habitants à tout ce qui ne les concerne pas et l’automne qui arrive, bah New York ressemble de moins en moins à Sex And The City quoi… Et ceux que tu croises rapidement dans le quartier de ta jeunesse, bah ça donne ça :
« -Alors, bien ? -Bah ça va. Et toi ? -Bien, bien t’as vu. Toujours à New York ? -Oui oui, toujours. -Putain ça tue sa race quand même, t’as d’la chance ».

De toute façon c’est simple, quand tu vis à New York, tu es de ceux qui ne peuvent qu’aller bien dans l’imaginaire collectif. Si tu lâches un « Oh c’est un peu difficile quand même » tu te manges un regard explicite. La pupille gauche t’insulte, la droite t’assomme et les sourcils te disent « Comment ça c’est difficile connasse tu vis à New York ». Ah ouais excuse, j’avais zappé. Donc tu réponds ce qui se dit dans les chansons à la mode… Moi Hamdoullah ça va !

Pour surmonter le choc des cultures y’a un truc que je n’avais jamais calculé jusqu’à cette semaine. La communauté. Pourtant j’ai pas quitté la France pour retrouver des Français, mais, un moment donné, tu satures face à la mentalité cainri et tu veux voir des gens qui ont baigné dans la même culture que toi, qui connaissent « Pas de pitié pour les croissants » et Oxmo Puccino, qui sont concernés par la mort de Lévi-Strauss, la baisse du dollar, le débat sur l’identité nationale ou le clash Kool Shen/Zemour. Parler, échanger, voir, partager ce que tu vis ici avec d’autres qui finalement vivent un peu la même chose, ça semble basique, pourtant, ça n’a rien d’évident. Alors hier, j’ai franchis le pas, avec des collègues Gaulois, on est allés à un afterwork Frenchy. OMG. So cliché ! (Je me donne un peu de contenance parce que je déteste l’idée de rester confiné dans ta communauté quand tu es à l’étranger….)

Finalement c’était pas si pire comme disent les Québécois. C’était supra prout prout. Costume, coupe au gel et mallette en cuir, « Mais mon ami, tu as 20 ans et tu es en stage à la BNP. Te prends pas trop au sérieux et pète un coup ! » Voilà grosso modo ce que j’avais envie de leur dire. Au final, je me suis retenue, j’ai gloussé à quelques blagues lourdes et mangé du pain sans rien, parce qu’ils avaient sorti un plateau de pâté et moi j’mange pas de porc. Et même si la communauté a ce petit quelque chose de rassurant, être avec des Français en chaussures de ville pistonnés par papa PDG de Bouygues, ça sonnait faux quand même. Anyway, je suis partie, après avoir apprécié juste à point le temps passé au « Tout va bien » le resto qui hostait l’afterwork. J’y allais aussi en mission : capter quelques images dossier et ramener pour vous quelques bribes de conversations qui m’ont ramenées à l’évidence… Les Français sont pour certains, très beaufs… Moments choisis :

« Quand tu fais 50 millions de dollars, t’as pas besoin de parler anglais »
Moi en pensée : J’ai du mal à voir comment tu peux faire autant sans parler anglais parce que c’est pas en France que tu feras « beaucoup money » pour reprendre l’expression de Lil Wayne

Le mec : « T’es déguisée en française ? »
La meuf : « Pourquoi ? »
Le mec éclate de rire « C’est une blague »
J’hésite à leur jeter des cailloux ou à partir en courant. J’adoooorrrrreee l’humour français…

« T’en penses quoi alors du PSG ces dernières années ? »
Profond, c’est profond ces conversations…

« Forcement en vivant ici, un moment, j’ai changé ! »
Ah ouais… Ok.

« Avant, j’étais attachée de presse pour sacs et chaussures »
Vive la France !

Grand moment ! Bref, en un mot, sois armé si tu viens ici plus de quelques semaines de vacances. Y’a le premier effet Kiss Kool, puis le deuxième. Au 3ème, ça te fait tout drôle. J’adore New York. Je pense que j’aime encore plus cette ville depuis que j’ai identifié ses limites. Mais être ici, c’est un choix, un effort et un plaisir. Ce n’est pas de la chance. Cheers!

The Travelin’ Girl.

4 responses to “Être Français(e) à New York…”

  1. Thomas on 27/09/2011 at 20:45 Thomas

    C’est vrai que les gens ont toujours tendance à idéaliser une ville quand ils n’y habitent pas. Ils gardent l’image qu’ils en ont en tant que touriste alors que vivre sur place est une expérience différente. Surtout New York !

  2. Vanina on 29/09/2011 at 19:20 Vanina

    Je me permets de partager votre article très bien écrit et que je trouve pertinent !

  3. Melfi on 11/10/2011 at 23:53 Melfi

    Encore un post intéressant , merci je vous rajoute dans mes favoris tout de suite 😉

  4. Casper on 18/10/2011 at 07:47 Casper

    I really could spend hrs reading through you, continue the good work and enjoy NY City!

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